Nous ne sommes pas certains que vous sachiez qui vous êtes ni qui nous sommes. Nous nous permettons de vous présenter bien que nous préfèrerions vous absenter mais votre réalité est d’une telle épaisseur de marne que nos souliers à chaque pas croient soulever un cheval mort. Nous souhaiterions, dans cette incommensurable distance qui nous sépare, que vous puissiez un jour, à l’occasion d’un raout, goûter à l’eau salée qui s’engouffre depuis des heures dans la gorge d’un migrant jeté de son rafiot en direction de votre royaume. C’est un pêcheur tout mince, le thorax creusé, une étoile filante en travers du front comme sur celui des chevaux dans les contes. Il a quitté son littoral parce que les contrats que vous avez passés avec des rois qui vous aident à régner ont vidé son océan de poissons. Alors il est venu voir si l’on pouvait lui céder deux ou trois sardines à l’huile.